LES FRANCAIS DANS LE CIEL RUSSE

COMMENT LES FRANCAIS COMBATTAIENT DANS LE CIEL RUSSE

(du livre "COMBRIG LUKICH »)
    
  Bataille de nuit. 

  L'histoire racontée par  Boris Yashchuk, 
    
  C'était il y a tant d'années ... Mais je me souviens de tout ... 
  C'était en 1944 en Union Soviétique ... 
  Enfant, je me souviens de ce combat nocturne. Il y avait un "crochet" inexplicable sur le tronçon Priluki - Kanev. Dans la soirée, pour une raison quelconque, près de la gare de Grebenka, deux de nos trains ont été enveloppés dans une branche allant à Mirgorod.

 Le commandant de la brigade Aleksey Lukich Sologubovsky a ordonné à mon père - le chef de l'échelon - de faire un arrêt urgent. Tous les soldats et officiers de la brigade ont reçu l'ordre d'interdire le feu, la fumée et de faire fondre les cuisines de campagne ... 
  Alexei Loukitch n'a pas expliqué ses   ordres urgents. La soirée descendit   dans toute la gloire du ciel coucher de soleil. Les couleurs flambaient, se remplaçant ... 
  Et tout à coup, de L'Ouest sur une bande de ciel brillante des points de plus en plus densément pointillés sont apparus. 
  Ma première impression .... - association avec des troupeaux d'oiseaux qui font un long vol. En fait, ils étaient des oiseaux ? mais  de proie d'un genre différent. 
  Ces jours-ci, l’aviation fasciste a lancé une série d ’attaques à la bombe contre des carrefours ferroviaires dans le but de s’accrocher à un front qui, sous les coups de l’Armée rouge, craquait à tout point. 
  Ma deuxième perception d `enfant - les bombardiers volaient comme des sauterelles ... Le rugissement terrifiant des avions ennemis grandissait. 
  Dans les rayons du soleil couchant, ils brillaient de petites gouttelettes. 
  Il a été ordonné de laisser les voitures et de se disperser. 
  Mais la cavalerie n'a pas laissé les voitures, où étaient les chevaux. 
  Tout le monde a continué à regarder toute une armada de fascistes   volant dans le ciel. 
  C'était   effrayant. 
  Quelque chose d'inévitable s'annonçait et même mon esprit enfantin se rendit compte que rien ne pouvait arrêter cette armada, probablement tout le monde pensait,  mais... tous s`ent trompés ...  
  Maintenant, je sais: seulement pour Alexei Lukich  Sologubovskiy,  commandant de la brigade, tout était clair! 

Les trains étaient sans défense au milieu des champs, à l'air libre. La brigade ne disposait que de quelques canons anti-aériens et elle était déjà prête au combat, mais que pouvait-elle faire contre l'armada de bombardiers ?

 La situation était pire que jamais, mais à l'extérieur, Aleksey Lukich était calme: il savait déjà que des escadrons du régiment d'avions de combat Normandie-Niemen se dressaient vers l'ennemi. 

Un opérateur radio des communications de la brigade connaissait un peu le français !

 Il rapportait au commandant de la brigade que des ordres de conversation mixtes russo-français étaient entendus en direct. C’est plutôt en russe, puis en français. 
  Je me souviens que les informations du quartier général de la brigade avaient été transmises instantanément d’un soldat à un autre, et bientôt tout le monde, même moi, le garçon qui avait l’idée la plus vague de la France lointaine, sut que les bombardements nazis étaient dirigés contre la station ferroviaire et nos  échelons militaires et que  pour les repousser les pilotes internationalistes français  et leurs camarades, pilotes soviétiques, sont dans le ciel !

  
  C'était à la fois joyeux et alarmant. Quelqu'un a dit, et tout le monde le savait instantanément, que parmi les Françaisil y a  non seulement les pilotes ordinaires, mais des barons éminents   de France qui étaient assis aux commandes des «yaks» soviétiques.

 Je ne savais pas qui était le "baron", mais je me suis rendu compte qu'il était une personne très respectée. 

Et quelqu'un a dit, je me suis souvenu: "Tous les honnêtes gens de la planète sont contre la peste brune. Et les barons aussi!" 
  Et sous nos yeux une image unique: les faucons rapides semblaient être tombés sur un troupeau fasciste. Et le manège céleste tournait dans le ciel qui se fanait. 
  Oui quoi! 
  Dans l'obscurité, nous ne pouvions plus voir d'avions, mais çà et là, des traces étaient tracées par des rafales de mitrailleuses de nos faucons, des panaches de bombardiers détruits apparaissant dans le ciel, des chutes et des explosions sanglantes au sol. 

Dans le ciel, il y avait un rugissement constant d'attaques de chasseurs et de bombardiers qui se dirigeaient vers nos échelons. Les lignes enflammées des pistes suivaient tout le ciel nocturne. 
  Je me souviens que, d'après les tirs bien ciblés de nos pilotes, j'avais déjà appelé « nos Français »  je serrai les poings en criant: "Frappe-le! Frappe le bâtard!" 

Plusieurs bombardiers ont explosé dans le ciel, à tel point qu'il est devenu bien clair. De nombreux nazis sont tombés au sol, comme en témoignent de puissantes explosions et le tremblement de terre qui a eu lieu sous nos pieds ... 
  Je ne me souviens pas de la durée de la bataille, mais d’une manière ou d’une autre, tout est mort subitement, des avions abattus brûlaient   à l’horizon  et le ciel clair se dissimulait, brillamment et solennellement, en noir. 
  Et dans ce silence, les gens restèrent immobiles, ne croyant toujours pas que les bombes ne leur tombaient pas sur la tête. Et on entendit le hennissement des chevaux, qui ne se doutaient même pas que ce soir pourrait être le dernier pour beaucoup d'entre eux ... 
  Et dans le ciel noir de notre Terre, les étoiles lointaines clignotaient, comme si elles savaient qu’il n’y avait pas d’autre planète vivante, et comme si elles nous, aux Terriens,  souhaitaient   de la paix et de la joie ... 
  Le matin, notre train a pris la route prévue. Et mon père m'a fait signe  de regarder à la fenêtre  les combattants en vol. 
Les avions  ont volé très bas au-dessus du sol. 
  Des flèches lumineuses brillaient sur leurs fuselages. 
  Ces faucons ont abattu les Allemands la nuit dernière et ... ont perdu leurs camarades. 
  "Ce sont les pilotes du régiment Normandie-Niemen", a déclaré le père. "" Les Français! Souviens-toi! " 
  Et je me souviens ... 
  Je me suis souvenu de tout…

Comme je me suis mordu la lèvre douloureusement, quand un faucon, comme avec une aile blessée, a fait  en flamme demi-tour vers notre train, puis est devenu soudainement en train de basculer et… s'est transformé en un éclair brillant qui s'est éteint en noir… 
  Tant d'années ont passé, mais je me souviens de tout ... 
  C'était le 2 avril 1944. 

  Boris Yashchuk